English

Blogs

On est en 2001 : assis par terre, j’observe en face de moi Pablo qui marche à quatre pattes et se retourne pour voir le regard de sa maman. Elle aussi est assise par terre dans le couloir, comme presque tous les patients qui attendent leur tour dans ce grand hôpital de Quito. L’enfant perd sa sucette, il se retourne pour voir la réaction de sa maman qui lui dit de la ramasser, puis il la remet dans sa bouche. Je suis frappé par la différence de culture entre la Suisse et l’Équateur. On m’a toujours dit de faire attention aux microbes, de me laver les mains, de ne pas toucher par terre, surtout dans un hôpital. Pourtant ces gens ont l’air en santé, robustes. On est en 2021 : j’observe une personne masquée seule dans sa voiture, un gel hydro-alcoolique à portée de main.

Récemment, une des quelques tribus de peuples primaires qui restent encore isolées dans la forêt amazonienne a cherché le contact avec le monde que ceux qui le peuple qualifient de civilisé. Malgré le désir de les préserver et qu’ils maintiennent leurs traditions en interdisant tout contact avec ces peuples[1], les autorités brésiliennes et péruviennes n’ont pas réussi à endiguer leur soif de se vêtir, de manger à leur faim et de prendre des selfies.

Michel vient de se séparer de sa compagne qui habite encore chez lui et qui refuse d’accepter la rupture. Elle semble mieux savoir que lui qu’il s’agit d’une erreur, n’ayant cesse de le lui rappeler avec un ton assertif, insistant et moralisateur. Étant donné qu’il est très mal à l’aise avec les conflits, il fait construire une cuisine et une salle de bains au sous-sol afin de s’aménager un espace où il peut cohabiter avec elle sans devoir la chasser.

Johann prenait des antidépresseurs depuis l’apparition de ses premières idées suicidaires, un traitement ordonné par un psychiatre des années plus tôt. Quand je l’ai vu la première fois, il avait comme une attitude d’équanimité artificielle. On parle parfois des antidépresseurs comme de stabilisateurs d’humeur, en d’autres termes des médicaments qui font qu’on ressent moins nos émotions. Toutes les émotions : celles que l’on ne souhaite pas ressentir (l’effet médicamenteux désiré) et aussi celles que l’on souhaite ressentir (l’effet secondaire du médicament

La LAMal va peut-être bientôt englober les prestations des psychothérapeutes non-médecins (on les appelle aussi psychologues)[1]. Cette reconnaissance fédérale induit des obligations liées au système de santé suisse, notamment vis-à-vis des assurances à travers rapports, diagnostics et preuves à fournir. Cette nouvelle position en est une d’expertise, donc de savoir. Et seuls les psychiatres ou formation jugée équivalente peuvent décider de prescrire une psychothérapie, juge la Société Suisse de Psychiatrie et Psychothérapie dans sa prise de position du 2 septembre 2019. Le médecin sait, on l’appelle traditionnellement docteur (du latin doctus « celui qui sait »). On ne dit pas des psychologues qu’ils sont docteurs[2], mais il arrive qu’on les appelle thérapeutes (du grec ancien θεραπευτής « serviteur, celui qui prend soin de quelqu'un »).

Le peuple avait élu Diego car il avait fait un beau discours et promis un certain nombre de choses qui avaient plu aux citoyens. Dans son discours il y avait un objectif et il avait dit « vision », mais ça a donné division. Il avait dit faire beaucoup, mais aujourd’hui la réalité diffère beaucoup. En contrepartie – et ça avait l’air honnête – il avait énuméré un certain nombre de points plus difficiles, dont il ne pourrait s’occuper. Il avait dit sept, mais c’était dix-sept.

Un enfant émerveillé observe intensément les flocons tomber du ciel. Son papa lui explique que c’est de l’eau solide qu’on appelle « neige ». L’enfant est alors catapulté dans une nouvelle expérience, celle de réfléchir son vécu. Il est alors privé de son expérience directe et de son émerveillement.

Quel profil psychologique ont les personnes qui s’intéressent aux profils psychologiques ? J’ai souvent entendu dire que les personnes qui choisissaient la psychologie avaient des problèmes. Cette opinion peut être blessante, mais je crois qu’elle a du vrai. En réalité, le fait d’avoir vécu et surmonté ses propres difficultés encourage la capacité d’empathie, donc facilite l’accompagnement d’autrui (Carl Gustav Jung parlait du guérisseur blessé). Les personnes que je juge les plus sages me donnent l’impression d’avoir digéré et intégré les blessures accumulées d’un parcours souvent riche et difficile. J’ai invité des collègues (psychiatres et psychothérapeutes, confirmés ou en formation) à s’exprimer sur ce qui les a amené·e·s à ce choix ("Qu’est-ce qui m’a fait choisir mon métier, comment j’en suis arrivé·e là, quelle est mon histoire?"), en maximum 1000 caractères espaces compris. Voici leurs réponses (par ordre alphabétique) :

Parce que nous sommes des animaux sociaux le jugement fait peur, et parce que nous avons besoin de nous sentir exister (j’y reviendrai plus tard), le jugement est menaçant. Il y a cependant des moyens de prendre du recul.  

Madeleine

Mon patron n’arrête pas de reprendre tout ce que je fais et dis, la plupart du temps sans raison. Ce matin je prends une décision, les collègues m’ont félicité et lui il m’a dit que c’était une mauvaise idée. Vous avez pas un truc pour qu’il cesse par hasard ?

Moi

Il n’y a que lui qui peut cesser… par contre vous pouvez agir sur votre réaction

Madeleine

Et comment ?

J’ai eu l’impression que ma mère avait à la fois besoin de mon aide et la refusait, ce qui m’a fait vivre un mélange de volonté d’aider, d’impuissance et de colère. C’est plusieurs années plus tard que je m’en suis vraiment rendu compte et que j’ai pu transformer ce vécu en quelque chose de constructif, en partie grâce à Nathalie. Du fait que Nathalie était une de mes premières clientes, je me mettais de la pression pour être un « bon » thérapeute. Je ne savais pas ce que ça voulait dire bien sûr, mais j’avais au moins l’intention du sauveur en herbe. Et Nathalie me semblait y être imperméable[1].